J’ai été eu !
Ce billet est la suite chronologique du billet « Le derrière du babouin… ou Dieu existe vraiment ! »…
Décidés à ne pas rester sur un échec et convaincus d’être puissamment protégés(voir le billet suivant !!), nous avons donc décidé de repartir. Il me fallait vite aller en ville pour faire réparer le pneu avant-droit, qui avait crevé le jeudi 1er avril. Je jette un oeil aux autres pneus et je découvre que mes deux pneus avant ont été méchamment labourés, sans doute pendant que j’étais tracté par le camion, et qu’ils ne tiendront jamais un autre voyage. En ville, on me propose deux pneus Michelin d’occasion, pas trop chers, qui sont montés en moins de 45 minutes. Reste à prendre de l’essence et acheter un pic-nic et c’est le départ, à deux voiture cette fois. Nous sommes cinq dans la nôtre, les Norvégiens sont huit !
Nous changeons d’itinéraire et décidons de prendre un nouvel axe bitumé qui part en direction du Tchad. Il est si nouveau que j’ai dû le dessiner sur ma carte de 1998 ! La route est excellente, parsemée d’innombrables villages… et sillonée par très très peu de minibus ! Vaudrait mieux pas tomber en panne. Mais la voiture, avec sa pompe neuve d’occasion, semble bien tenir.
Après 180 km, nous quittons le goudron pour attaquer la piste qui mène plus au Nord, vers l’entrée du parc de Boubandjida. La piste est d’abord bonne, puis plus pénible, avec des affleurements de rochers et des trous innombrables. Soucieux de ménager ma monture, je dois faire preuve d’une concentration de chaque instant pour ne pas passer dans le trou de trop ! Nous nous autorisons quelques modestes pauses et après 3 heures 30 de pistes, pour 110 km, nous arrivons à l’entrée du parc. Il reste 38 km de piste dans le parc pour rejoindre le campement. Il est 16h30. Nous pensons en avoir pour 1 heure. Mais la piste est nettement plus mauvaise et, avec ma voiture un peu basse, je ne peux guère dépasser les 20 km/h. Nous prenons alors une piste annexe dans l’espoir de voir déjà quelques animaux. Circuler à deux voitures, en étant le second, est une idée très moyenne : la voiture de devant voit les animaux, qui voient la voiture de devant et partent. C’est alors qu’arrive la voiture de derrière. Vous voyez ?
Peu avant l’arrivée au campement, il faut traverser un mayo. Il s’agit d’une rivière asséchée en saison sèche. La piste devient alors très caillouteuse. Mais surtout, de l’autre côté, il faut remonter une côte…. impressionnante et tapissée de rochers lisses. Confiant dans les possibilités de ma Rav4, je me lance et je parviens… péniblement à la moitié de la pente avant de patiner sur les cailloux. Je recule, et je me relance… sans plus de succès. La nuit tombe. Je me dis que, décidément, ce 4×4 ne croche pas tellement ! Je recule jusqu’au milieu du lit de la rivière et j’accélère comme un malade. Cela tape sous la voiture à chaque gros caillou. La voiture s’élance, je braque à droite en visant une zone moins caillouteuse et…. je parviens péniblement en haut ! Il reste 4 kilomètres dans la nuit avant d’atteindre le campement. Nous y attend un boukarou (bungalow) avec… 3 lits au lieu de 4 ! Mais, nous pouvons surtout prendre une bonne douche fraiche, changer d’habits et rejoindre nos amis pour la soirée. Le repas est consistant, sans être gastronomique. Le prix, lui, est (g)astronomique mais, après avoir vu la piste par laquelle il faut faire transiter les vivres, cela paraît raisonnable. La nuit est fraiche, la bière glacée, la citronnelle parfumée et les cris d’animaux ajoutent une note… locale !
Ce sont d’autres animaux qui vont perturber notre sommeil. D’une espèce que l’on souhaiterait peu rencontrer en face à face : le gros touristes Français habité par des relents de colonialisme. Bref, il hurle tard le soir et il recommence tôt le matin, parce qu’il se sent chez lui ! Mais il aura l’occasion de se racheter…
Au matin, nous déjeunons avec quelques provisions emportées de Ngaoundéré (et qui ont assez mal supporté la chaleur) avant de partir pour 3 heures de ballades en voiture dans le parc. Nous emmenons un guide, un vieux papa qui ne parle que le fulfuldé. Il connaît toutefois le nom des animaux en français, ce qui est déjà pas mal… Nous abordons donc une piste qui mène dans le parc. Tout va très bien pendant une bonne demi-heure. Puis nous arrivons sur les bords d’une grande rivière asséchée. Le fond du mayo n’est que du sable, ce qui ne devrait pas être un trop gros problème pour une véhicule 4×4. Je me lance donc… et reste planté dans le sable au bout de quelques mètres !!! La voiture, un peu trop basse, repose entièrement sur le banc de sable, les roues tournent dans le vide. Bizarre tout de même…
C’est alors qu’arrive, par derrière, un gros 4×4 avec deux Français, de l’espèce sus-mentionnée. Ils proposent de nous tirer vers l’arrière à l’aide de ma corde de remorquage, qui commence à souffrir. Cela se fait sans trop de problème. Je les laisse alors passer le mayo, prend de l’élan et m’élance à plein gaz. Je passe le premier banc de sable, la voiture continue à avancer jusqu’à un deuxième banc et… se plante à nouveau. Les Français, qui sont maintenant devant nous, nous tirent une seconde fois et nous nous extrayons de ce fichu mayo. Ils se seront bien rachetés !
L’aventure nous a permis de découvrir un fait intéressant : notre voiture n’est pas un 4×4, mais seulement une traction avant !!!! Et pourtant, j’avais bien précisé, avant de l’acheter, qui je recherchais un véhicule tout terrain. De plus, le parc de Boubandjida est strictement réservé aux véhicules 4×4. Voilà qui va s’avérer sportif !!!!
Je demande au guide si d’autres mayos ensablés nous attendent, il m’assure que non. Nous continuons donc en nous concentrant sur l’activité principale de cette ballade : voir des animaux. Nous voyons toute une panoplie d’antilopes : oribi, cobes de buffon, cobe de fassa, hypotrague,… Quelques phacochères croisent aussi notre chemin.
Tout à coup, au détour d’un virage, la piste est coupée par un gigantesque fossé, peu large mais bien profond. Je me tourne vers le guide et lui demande si la piste est gâtée et s’il va falloir faire demi-tour. Il me dit que non, c’est normal. Je ne vois pas du tout comment ma voiture va passer ce fossé. Je m’y engage quand même. L’avant de ma voiture avance tout doucement, il touche le fond du fossé, le pare-buffle racle le sol, les roues avant commencent à remonter. Cela racle toujours. J’accélère alors et la voiture sort miraculeusement du fossé. Je n’y croyais pas moi-même.
Je me dis que le plus dur est fait. J’ai tort… Nous ne tardons pas à arriver vers une autre rivière asséchée. Le sol est d’abord caillouteux, puis sabloneux. Le guide me dit que non, il n’y a pas de sable. Le mot sable ne doit pas désigner la même chose pour lui et moi… Je lance la voiture et…. reste planté dans le sable. Les roues avant tournent dans le vide. Nous plaçons quelques cailloux dessous pour favoriser l’adhérence et les pneus se mettent à dégager une terrible fumée noir de caoutchouc brûlé. Heureusement, nos amis norvégiens ne sont pas loin derrière et nous nous mettons à cinq pour pousser la voiture, qui finit par passer l’obstacle. Je continue en direction de la sortie du parc. La ballade aura duré 4 heures et se sera révélée épuisante psychologiquement pour moi, tant un véhicule avec traction avant n’est pas adapté aux pistes du parc.
Pour rentrer sur Ngaoundéré, nous décidons de prendre une piste différente de celle de l’aller. Des Norvégiens ont passé là quelques jours plus tôt, il paraît qu’elle est en bon état. Je vais vite constater que les Norvégiens, avec leurs gros 4×4 bien surélevés, et moi, avec ma Rav4 peu adaptée, nous n’avons pas la même notion de « bonne piste ». Il y a en effet peu de trous, mais les deux traces gauche et droite sont creusées et, au milieu de la piste, émergent régulièrement de gros rochers, que je ne peux pas passer sans toucher. Il me faut donc rouler sur les bords de la piste, à une vitesse d’escargot (moins de 25 km/h). Les pneus sont mis à rude épreuve et je finis par crever une roue arrière. La voiture norvégienne, qui nous attend tous les 10 km environ, est hors de vue et j’ai le temps de changer ma roue avant de la voir arriver. Nous repartons et je passe devant, pour que nous restions un peu plus groupés. N’ayant plus de roue de secours (j’ai essayé en vain d’en acheter une seconde à Ngaoundéré, difficile à trouver), je n’ai plus droit à l’erreur !
Quelques dizaines de kilomètres plus loin, nous arrivons au campement du Buffle Noir au sein du Parc National de la Bénoué, du nom de la rivière qui traverse le parc. Il est 17h00. Nous négocions notre entrée dans le parc pour aller vite voir à pied un troupeau d’hippopotames. Il nous faut à peine 25 minutes de marche pour arriver à l’endroit où le troupeau de 25 individus demeure en permanence. La chaleur n’est plus trop forte, mais les hippos sont tous dans l’eau jusqu’aux oreilles. Ils sortent le matin, mais passent ensuite la journée dans l’eau. Avantage des hippos sur les gazelles : ils bougent beaucoup moins et surtout moins vite ! Cette petite ballade aura le mérite de nous faire un peu bouger, car sinon on passe sa vie dans la voiture !
Nous repartons à la tombée de la nuit. La piste de 30 km qui mène du campement jusqu’au goudron est en très bon état. Mais il faudra tout de même 50 minutes, car rouler de nuit sur une piste n’est pas très confortable. Restent deux heures de route sur le goudron avant d’atteindre Ngaoundéré vers 21h30. Nous nous arrêtons pour acheter quelques provisions, en particulier de délicieuses brochettes de viande appelées soya, car nous n’avons encore rien mangé. Nous nous couchons enfin, éreintés, après avoir passé 36 heures loin de chez nous, dont près de 18 heures dans la voiture !!!
En se réveillant le dimanche matin, matin de Pâques, nous constatons que l’autre pneu arrière est à plat… Dieu nous a bien conduits, nous sommes à nouveau rentrés sains et saufs. Mais j’ai comme l’impression qu’il me faut arrêter de Le mettre à l’épreuve. Il a déjà beaucoup fait pour nous en quelques jours… un peu de repos Lui fera aussi du bien !
Classé dans: Les voyages, Insolite le 6 avril 2010 | Aucun commentaire »